Quels sont les autres mécanismes favorables aux entrepreneurs?
Le holding ou société de portefeuille (SPOR) a souvent été utilisé pour le fractionnement du revenu au bénéfice de personnes liées et particulièrement d’enfants. Avec l’instauration de l’impôt sur le revenu fractionné (« Kiddie Tax ») en 2000, les revenus de l’actionnaire ou du contribuable attribués à des personnes de moins de 18 ans sous forme de don ou de prêt soit directement ou indirectement par le biais d’une fiducie étaient imposés entre ses mains. Le sort de l’enfant adulte a été toutefois revu avec les modifications à la loi fiscale du 18 juillet 2017, le but du législateur étant de limiter le bénéfice des revenus d’une entreprise aux seules personnes qui y sont impliquées. Le transfert de placement à une société dont les actions sont détenues par des enfants adultes soit directement ou par le biais d’une fiducie afin de permettre une déclaration de dividende au bénéficie de l’enfant ou de la fiducie notamment pour des fins de financement d’études post-secondaires ne se fera plus sans impôt. En fait, la partie fractionnée i.e. partie du revenu supérieure à la somme qui aurait été payée par une entreprise n’ayant aucun lien de dépendance sera assujettie à l’impôt spécial1. Privé d’un avantage qui lui était reconnu en vertu de la LIR, l’entrepreneur est en droit de se demander quels sont les autres mécanismes favorables d’optimisation fiscale encore utiles pour ses revenus de placement dont le taux d’imposition marginale peut atteindre 50% et plus.
Le compte de dividende en capital (CDC)
Le compte de dividende en capital (ci-après « CDC ») est un outil d’intégration fiscale qui permet à l’actionnaire d’une société privée sous contrôle canadien de recevoir des dividendes libres d’impôt lorsque la société a réalisé un gain en capital ou a reçu le produit d’assurance vie dont elle a été bénéficiaire.
Le CDC est un compte fictif ou théorique (écriture plus fiscale que comptable) qui tient compte des gains et des pertes en capital réalisé par la société lors de disposition par celle-ci de ses immobilisations et de ses biens amortissables. Dans le CDC on retrouve la partie non imposable du gain en capital ainsi que les dividendes payés par une autre société, auxquels on soustrait la partie non déductible des pertes en capital et tous les versements de dividende en capital.
Sur le plan fiscal, la déclaration d’un gain en capital peut être plus avantageuse pour le contribuable puisque seule la moitié du gain est imposable au taux des revenus passifs. La deuxième moitié ainsi inscrite au compte de dividende en capital peut être versée à l’actionnaire sous forme de dividende non imposable. Toutefois, le choix par la société de verser ce dividende doit être fait selon la procédure prévue par règlement et ce, dans les délais prescrits en utilisant le formulaire requis1, accompagné d’une résolution certifiée conforme des administrateurs de la société ou de l’autorisation des personnes habilitées à administrer la société, auxquels sont joints des tableaux indiquant le calcul du montant disponible pour la société, immédiatement avant l’exercice du choix. La société doit s’assurer que le montant du dividende ainsi versé ne dépasse pas le solde du CDC, sous peine des pénalités.
Compte d’’impôt en main remboursable au titre de dividendes (ci-après « IMRTD »)
L’IMRTD tout comme le CDC est un compte théorique que contient la totalité de l’impôt au taux de 33 1/3% payé sur les dividendes reçus d’une société canadienne. Ainsi, un remboursement de 1 $ par tranche de 3$ versé en dividende imposable est effectué au bénéfice de la société jusqu’à concurrence du solde du compte d’IMRTD. L’actionnaire quant à lui reçoit un crédit d’impôt pour dividendes après majoration de ces derniers. 26,67% de l’impôt payé sur les revenus de placement tel que le revenu d’intérêt et le gain en capital peut également être déposé sur le compte d’IMRTD.
Les actions à dividendes discrétionnaires
Avec les modifications fiscales du 18 juillet 2017 qui affectent le fractionnement de revenu (dividende) au bénéfice d’une fiducie familiale dont les bénéficiaires seraient des jeunes (de 17-24 ans et les plus de 25 ans) ainsi que l’intégration de la notion de caractère raisonnable quant à l’apport de ces derniers dans la société tant en main d’œuvre qu’en capital ou risque, pour établir leur droit ou non à des dividendes non imposables, il est légitime de se demander quoi faire pour un fractionnement de revenu sans SPOR et ce, sans gros risque fiscal.
De l’analyse que nous faisons, nous pensons que le contribuable peut se servir de ce que nous appelons produit fiscalement avantageux pour les investisseurs soit les actions participantes à dividendes discrétionnaires avec valeur établie à la juste valeur marchande au moment de leur émission, détenues par les membres de la famille soit dans une situation de gel successoral ou de cristallisation de la déduction pour gain en capital (sous certaines conditions).
Il faut noter que le fractionnement de revenu rendu possible ne s’opère sans conséquences de redressement et pénalités que si l’utilisation des actions à dividende discrétionnaire n’est pas un simulacre c’est-à-dire que les détenteurs de ses actions (membres de la famille) ne sont pas que des intermédiaires qui permettent à l’actionnaire principal d’extraire des fonds de la société tout en minimisant son imposition. L’entrepreneur qui se trouve dans ce cas, compte tenu de son intention initiale, ne passera pas les tests de l’article 245 (2) LIR.
Au final, bien que nous partageons l’assertion selon laquelle il peut s’avérer moins avantageux pour le contribuable dans certaines circonstances de gagner des revenus d’intérêts, des gains en capital et des dividendes déterminés par l’entremise d’une société de portefeuille1, il nous apparaît encore pertinent de dire que la SPOR reste un outil efficace et stratégique dans le cadre de la planification fiscale et financière tant comme instrument de placement en vue de percevoir des dividendes, de fractionnement de revenu avec les enfants adultes exerçant une activité active dans la SEXPL2, de protection d’actif, d’achat et vente d’actions ou d’actifs ou de transfert de patrimoine par l’effet de gel successoral.